Quand la presse exécute un portrait de Joissains...


vendredi 29 juin 2012

Quand la presse exécute un portrait de Joissains...

joissains portrait couleur - Copie 
La politique et le personnel politique de chez nous vus de Paris. Mercredi, Le Nouvel économiste a publié un article brossé à la façon d'un tableau qui ne révèlerait quelques-uns de ses mystères qu'après avoir gratté la crasse accumulée au fil des siècles sur le vernis de la peinture. Apparaît alors une sorte de mosaïque aux mille facettes composant au final le paysage caché.
Le style de l'article est enlevé et on ne peine pas à le parcourir avec curiosité d'un bout à l'autre. A chaque paragraphe, son coup d'estoc. Et il y en a beaucoup. Et pour tout le monde : les Joissains, Medvedowsky, Guérini, Aix, Marseille, la lumière et l'ombre, le brillant et le glauque.
Des Aixois trouveront peut-être que ce récit ne reflète pas forcément l'image qu'ils se font de leur ville. On peut toujours chipoter sur telle ou telle manière de présenter les choses. Mais, difficile de contester les faits car tout ce qui y est décrit colle finalement à la réalité. Allez, bonne découverte... 
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Cours, Mirabeau ! Le Vieux-Port est derrière toi 
Publié le 27 juin 2012 Par Pierre-Louis Rozynès 
(Les inter-titres sont de moi)
Aix-en-Provence, ses rues étroites, ses boutiques de luxe, ses platanes, ses étudiantes, ses calissons d’Aix… Ne vous y fiez pas Parfois, une ville finit pas ressembler à son maire. Marseille ment avec l’accent, on donnerait à Lille le Bon Dieu sans confession, Paris semble avoir fait la fête hier soir et Aix-en-Provence est maquillée comme une voiture volée.
Les vies sont des romans d’inégale valeur. Celles du personnel politique aussi. Les vies d’énarques sont ennuyeuses comme la pluie. A Aix-en-Provence où il pleut peu, il y en aurait bien un qui aurait un peu d’intérêt. C’est le leader socialiste local. A l’heure où je vous parle, il sort de chez le juge Duchaine, signe qu’il appartient, ou devrait-on écrire, appartenait, à l’élite départementale. Il jure qu’on n’a rien à lui reprocher. Si d’aventure la politique l’abandonnait, il pourrait toujours compter sur le business pour tenir son train de vie.
A Aix, tout commence cours Mirabeau. En cinq cents mètres tout est dit. C’est les Champs-Elysées et Saint-Germain à la fois. Tout est à quelques jets de pierre de là. A Aix-en-Provence, il y a un institut d’études politiques où l’on n’évoque pas certains sujets. Pas de cours sur les dynasties politiques. Pourtant, cette réalité si méditérranéenne mériterait un enseignement à part entière.
A cent mètres de là, à la mairie, on croiserait la maire actuelle, Maryse Joissains, et son mari, ancien maire condamné pour avoir fait faire des travaux dans la maison de son beau-père avec des fonds destinés à la construction d'un établissement scolaire, et aussi leur fille, qu’ils ont mise adjointe à la culture et sénatrice. On pourrait creuser plus profond mais la maire est procédurière. La meilleure biographie des Joissains est un article, et encore s’arrête-t-il en 2006. Or, le meilleur semble encore à venir.
Cet article a valu à Maryse Joissains, qui déteste les rouges, de devoir faire un chèque à Claude Perdriel, en qualité de directeur de la publication du Nouvel Obs, un journal qu’elle ferait bien interdire si elle en avait le pouvoir. Faire un chèque d’excuse à un milliardaire rose, quelle punition !
L’article racontait la saga des Joissains et fourmillait d’anecdotes de favoritisme, d’anticommunisme, de populisme, de psychisme et son titre s’interrogeait : “Est-elle à la hauteur ?” A la hauteur de quoi, d’abord ? Vue de Paris, évidemment, elle détonnait déjà avec ses airs de poissonnière. Elue par accident en 2001, elle achevait son premier mandat sous les quolibets.
Le maire précédent était un filleul de Gaston Defferre. Il était fade mais n’avait pas démérité, il avait lancé de grands travaux et abordait son nouveau mandat avec la nonchalance du favori. Patatras. Trois listes à droite, dont celle de Maryse. Elle fit l’union avec un UDF BCBG et le FN, leur promit des postes, des délégations. Ils la crurent, elle leur reprit ce qu’elle leur avait accordé au gré de ses colères et les Joissains reprirent en main la ville qu’Alain, son mari, avait dû céder après sa condamnation et leur descente aux enfers. 
Les Joissains à la manœuvre Alain et Maryse étaient des jeunes loups du Parti radical. Parti de rien, il s’était mis dans la roue de JJSS et avait remporté, auréolé de cette modernité, les municipales de 78. Patatras, il avait été un des premiers élus à se faire prendre la main dans le pot de confiture. Sa déchéance n’en fut que plus douloureuse. Son beau-père, auquel il avait offert quelques travaux d’agrandissement de sa villa, s’en suicida d’un coup de fusil et les Joissains ruminèrent quinze ans une vengeance que personne ne vit venir.
Cette petite sous-préfecture, dont la population a triplé en cinquante ans, avait impérativement besoin de s’étendre. Elle ne respirait plus. Un cours qui encerclait la vieille ville faisait office de périphérique au-delà duquel s’étaient posées les facultés et des résidences pour les cadres et profs qui affluaient. Vivre à Aix était du dernier chic. Marseille commençait à sentir la racaille et le renfermé depuis la fin des colonies, et puis ce n’était pas une ville pour intellectuels, surtout ceux de la fonction publique aux congés à rallonge, qui prirent goût à cette Provence ombragée teintée de culture pour touristes et qui grillonne l’été.
Oui, Aix-en-Provence est une ville cultivée. Mais une culture de profs et d’avocats, de fonctionnaires et de professions libérales, d’étudiants en sciences humaines happés par la fainéantise provençale. Si le campus d’Aix fait battre 50.000 petits coeurs d’étudiants (un tiers de la population aixoise), on n’y fomenta jamais la moindre révolution. Aucun repaire gauchiste à Aix-en-Provence, pas plus hier qu’aujourd’hui. Tout juste peut-on noter qu’elle détient le record de la plus longue grève (trois mois) lors de la réforme du statut des universités.
Traditionnellement, les amphis sont plus durs à remplir que les bars ou les salles du centre-ville qui passent les films en VO. On a compté jusqu’à cinq grandes librairies de haute tenue dans cette ville où la Fnac ne s’est posée qu’il y a sept ou huit ans. Quelques hôtels particuliers transformés en musées, des vieilles pierres à en revendre, un festival d’opéra l’été, un cours Mirabeau pour se pavaner et assez de boutiques de mode et de luxe pour vivre en autarcie. D’ailleurs, les Marseillais s’habillent à Aix. C’est leur centre commercial de luxe à ciel ouvert, le centre-ville qu’ils n’ont pas.
Mais qu’on ne s’y trompe pas, si Marseille a besoin d’Aix, Aix se passerait volontiers de la tutelle administrative de Marseille. Tout les a toujours éloignées. D’abord historiquement. Si elles sont à dix minutes d’autoroute (à 200 à l’heure en pleine nuit, une heure en pleine journée) l’une de l’autre, elles n’ont pas le même ADN. Marseille a été fondée par des marchands grecs et l’est toujours restée, elle n’est jamais allée au-delà des collines qui l’encerclent et, croit-elle encore, la protègent. Aix a été fondée par des Romains mais 2.500 ans plus tard, c’est une ville d’eau paisible qui n’aspire avec un égoïsme assumé qu’à la qualité de sa vie.
Tout y est argent. Le commerce prospère, les bars prospèrent, les boîtes de nuit prospèrent, les restaurants pullulent, les touristes se pressent.
Maryse Joissains hystérisée
Picheral (“Piche”), socialiste moustachu et bon bourgeois, a entamé les travaux nécessaires à son expansion. Ces vingt dernières années, de nouveaux quartiers sont nés, tous du même ocre lassant jusqu’au nouveau quartier d’habitation et de commerce du centre-ville, une sorte de “Domaine des Dieux” dans le prolongement du cours Mirabeau, avec H&M et Darty au rez de chaussée. Une belle opération immobilière.
D’ailleurs, à Aix, tout n’est qu’immobilier et si “Maryse” tient depuis qu’elle a battu “Piche” et “niqué” ses propres alliés UDF, c’est qu’elle répond aux intérêts de plusieurs électorats : elle protège les commerçants, rassure les petits bourgeois et les vieux, et tamponne les papiers de la haute, celle qui fait des affaires. Que demander de plus ?
Sauf qu’aux prochaines municipales, si Aix vote toujours par intérêt, celui-ci pourrait être d’avoir un maire de la même couleur que les tenanciers des conseils régional et général, de la communauté urbaine de Marseille et, accessoirement, du gouvernement. A Aix, on n’a jamais eu la même passion qu’à Marseille pour la politique, à part chez les Joissains.
Hystérisée par la victoire socialiste à la présidentielle, elle avait demandé l’invalidation de l’élection de Hollande et s’était fait publiquement remettre à sa place. La semaine suivante, elle éructait vingt minutes durant dans une interview vidéo à un site local qui a fait les délices d’Internet. Avec elle, le public parisien découvrait une Morano puissance mille mais sa chance, c’est que le théâtre politique méridional ne soulève même plus un sourcil.
C’est une vue parisienne de croire que les dérapages répétés de “Maryse” entraînent les Joissains dans un mur électoral. Une dynastie qui réussit est celle où l’on sait passer la main. Dans son genre, Maryse est une star qui prend de l’ampleur avec le temps. Elle claque la bise et tutoie, inaugure à tour de bras et traîne cette vulgarité de ceux qui ne savent pas et osent donc tout sans le savoir.
A Aix, tout le monde l’appelle “Maryse”, d’abord pour oublier qu’elle s’appelle Joissains, nom maudit même si la moitié de la population est arrivée après “l’affaire”, et aussi parce qu’elle est maire et maman.
Elle est comme ça, excessive en tout. Même dans sa vie familiale. Alain, le maire maudit, vit sa vie mais fait le dircab (ce qui lui a valu une condamnation pour rémunération dont le montant a été jugé administrativement exagéré) ; tout le monde vit ensemble, fait la roue quand tout va bien ou forme la tortue quand tout va mal. On ne peut être dynastique si l’on n’est pas tribal. Et en ce moment, tout va-t-il si mal pour les Joissains, ces Borgias (ambition et transgression) de la politique méditerranéenne ?
Maryse est fatiguée. La grande croix qu’elle porte ostensiblement ne soulage pas son esprit et son échec aux législatives l’a mise dans tous ses états. 
"Les prochaines municipales seront sanglantes"
Elle veut faire élire sa fille, Sophie, son double paraît-il, une gravure de mode à la moscovite, blonde platine, cheveux ras. Elle est déjà sénatrice depuis 2008. Un cadeau que Maryse a arraché à Gaudin qui la prend pour une femme vulgaire mais fortiche, avec laquelle il faut mieux composer parce qu’elle est capable de tout.
A Marseille, en 2008, de son côté, Guérini, au faîte de sa toute-puissance, avait fait une sénatrice lui aussi, Samia Ghali. Même génération de quadras dont on entendra reparler et qui fréquentent peu le Sénat mais connaissent la tambouille politique.
Le lien principal entre Aix et Marseille est judiciaire. La cour d’appel est à Aix. Tout ce qui est jugé à Marseille y est rejugé. Le palais de justice est juste derrière le cours Mirabeau, c’est l’ancienne prison qui a été transformée.
Même pour ses repris de justice, Aix n’a pas besoin des Baumettes, elle a la prison de Luynes, toute moderne et toute proche des autoroutes, à mi-chemin d’Aix, de Marseille, de l’aéroport et de la gare TGV. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si les truands d’envergure se sont souvent installés dans ce coin discret, nulle part mais tout près de tout. Francis le Belge y avait sa villa, avec stand de tir au sous-sol que font parfois visiter ses propriétaires luxembourgeois. Plus récemment, les Barresi y avaient même le siège de leurs petites entreprises qui faisaient tant d’affaires avec les politiciens corses de Corse ou de Marseille.
Jusqu’ici, l’affaire Guérini et les tueries marseillaises entre Corses n’avaient pas écorné l’image d’Aix. Pourtant, les connaisseurs savaient que les brasseries appartiennent à des calibres du grand banditisme. Ils savent que si un juge s’intéresse de trop près un jour au plateau de l’Arbois, c’est tout le personnel politique du nord des Bouches-du- Rhône qui risque de finir entre deux gendarmes.
Trente kilomètres de sièges sociaux, de villes champignons, de taxes et de détaxes, de foncier, de POS, de PLU qui ont valu à Alexandre Medvedowsky, l’énarque socialiste de tout à l’heure, quelques soucis.
Toujours côté gauche, Olivier Ferrand, le cerveau du think tank Terra Nova, élu député contre toute attente du côté de Salon-de-Provence, raconte qu’il sera ministre mais pas avant 2014. Ce sera alors son suppléant qui deviendra député, s’il n’a pas été inquièté d’ici là. Etc., etc. Jusqu’au probable candidat PS aux municipales à Aix. C’est l’homme qui vient de voler à sa mère son siège de député. Parti en campagne pour perdre avec les honneurs, il se retrouve avec la vague rose en position de force pour ravir la mairie. C’est un pur apparatchik mais avec une bonne tête de cadre sup, pas d’accent, ce qui est parfois reposant. Il est maire d’un petit bled au nord d’Aix un peu étroit pour lui et patron de la fédération socialiste du département et à ce titre, c’était l’un des guérinistes les plus zèlés jusqu’à il y a peu.
Que Sophie la Moscovite ou Ciot l’apparatchik soit élu, on regrettera Maryse pour le spectacle. Elle seule est capable d’accueillir VS Naipaul, tout juste prix Nobel de littérature, d’un claquement de baiser et d’un 
“bonjour bonjour, ne vous dérangez pas pour moi, je viens juste vous dire que je suis très heureuse de vous accueillir dans notre bonne ville qui aime tant la culture et que si je ne vous ai pas lu, mes assistants m’ont dit que ce que vous écriviez était très bien alors bonne continuation, je file remettre le prix du livre provençal”.
Le problème avec “Maryse”, c’est qu’elle a de la Provence la sensibilité d’un santon qui empesterait la lavande et serait empaqueté dans du tissu Souleiado. Une ville ressemble toujours à son maire.
Posté par CASTRONOVO à 00:10 -  - Commentaires [3] - Rétroliens [0] - Permalien [#

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